Loges

Dans la cour d’un ancien ensemble viticole patara, le toit d’un long bâtiment bas, annexe, se prolonge au nord en un appenti divisé en quatre alvéoles.
On y remisait du bois.
Dans la famille, cet appenti était appelé les « loges ».

Deux des quatre loges

Le Dictionnaire du français régional de Bourgogne signale une acception particulière du mot « loge » :
n.f., cabane de bucheron. Usuel dans la Nièvre en Saône-et-Loire (sud du Morvan). Également petit hangar (Charolais) ; rare en Côte-d’Or. Synonymes : cadole, culot.

Le terme est utilisé dans les pays de forêt. Il est fréquent en Sologne, dans le Berry et dans le Morvan par exemple pour désigner des cabannes de bucherons, de charbonniers ou de sabotiers.  Les cartes postales 1900 ont conservé des images de ces « loges » :
– loges de bucherons dans les forêts d’Ingrannes et de Russy en Sologne, d’Othe dans l’Yonne, de Villiers Adam dans le Val d’Oise…
– loges de charbonniers dans les forêts de Saint-Germain dans l’Yonne, du Trainou dans le Loiret, de Coye dans l’Oise, de Bizy dans l’Eure…
– loges de sabotiers dans la forêt du Gavre en Loire inférieure, de Mormal dans le Nord…
Certaine sont sans précision de lieu, comme si le sujet était déjà en soi un cliché pittoresque. Ou bien l’on n’indique que la province : Nivernais, voire Bretagne. Les personnage ont souvent l’air de poser.
Tous ces abris sont des cabanes bois et chaume. Rien à voir avec nos cabottes de pierre.

Loge de charbonniers, carte postale, entre 1903 et 1917.
Loge de bucherons dans la forêt de Russy (Loir et Cher), au sud de Blois, carte postale, ND phot.

Les locuteurs  pataras se sont sans doute appropriés ce terme de forestiers du Morvan voisin. De ces constructions, il s ont retenu la forme d’un abri précaire, en bois, ouvert sur un côté.
Cette forme en U se retrouve dans un usage plus national. C’est ce mot qui était employé jusque dans les années 1970, pour le concours d’entrée aux Beaux-Arts de Paris, où les candidats planchaient sur un sujet, séparés entre eux par une cloison. Le concours durait plusieurs jours : ils « entraient en loge ».
Clin d’œil de l’histoire, l’un des ancêtres de la maison où nous avons relevé cet usage de « loge », a fréquenté les cours de l’école des Beaux-Arts de Dijon. Il n’est jamais entré en loge à Paris. Il lui suffisait d’aller chercher du bois !